Métiers forestiers d'autrefois II - charbonnier ciste 77700

Publié le par curiosus

LES PLACES A FEUX OU CHARBONNIERES

 

Mais comment ont-elles été façonnées ? à quoi servaient-elles ?

La fabrication du charbon de bois est une industrie millénaire qui remonte à la plus haute antiquité. Deux siècles avant l'ère chrétienne, on en découvre les procédés qui sont restés les mêmes jusqu'à aujourd'hui.

 

I] Carbonisation du bois :

 

            Un bois est composé de carbones d'oxygène, hydrogène et d'azote en faible quantité.

            Pour un Chêne on a 88.2 % de carbone, 7,4 % d'oxygène, 2,8% d'hydrogène et 1,5% de cendres.

            Chauffé à l'abri de l'air à environ 300 °c (selon les procédés), les produits volatils s'échappent et il reste un résidu fixe appelé charbon de bois.

            Mais en fait, lors de la chauffe, le carbone peut se méler aux produits volatils.

            Le rendement est très variable pour les quelques raisons suivantes (non exhaustives) :

                        Perte du carbone dù   à la vaporisation d'eau

                                                           à l'élévation au rouge de la masse entière

                                                           à l’absorption de l'enveloppe de la meule

                                                           à la négligence des charbonniers

                        Mauvaise météo

                        Mauvais empilement du bois

                        Etc...

            Plus la température est élevée, plus le carbone à tendance à se porter sur les principes volatils..

            Le rendement est exprimé en pourcentage de poids (ex. rdt de 17 % correspond à 17 kg de charbon de bois pour 100 kg de bois )

 

II] Procédés de carbonisation :

 

21) Proçédés par meules :

 

                        Les bois sont empilés, par lits superposés, sur une aire dressée avec soin et appelée faulde, de façon à former un tas, dit meule ou fourneau, ayant la forme d'une calotte sphérique surélevée. La meule est recouverte d'une enveloppe de feuilles sèches et de mousses, sur laquelle on dispose, pour empêcher l'accès de l'air, une couverture formée de terres mélangées de fraisil ou frasin, poussier provenant de fourneaux précédemment carbonisés. Cet habillage de la meule reçoit parfois le nom de bougeage. On met le feu par le haut, au moyen d'une cheminée ménagée au centre, ou, plus rarement, par des canaux réservés dans la masse du bois contre le sol. Le charbonnier dirige l'opération en ouvrant successivement des évents dans les différents points de la couverture.

                        Le foyer est au contact du bois.

                        Il faut chauffer à 700 °c pour obtenir la carbonisation

                        Un fourneau reste en feu pendant environ 8 jours.

                        Le volume des meules varie d'une région à l'autres de 2 stères à 300 stères (en Côte-d'or ce serait de l'ordre de 8-15 stères).

                        La qualité du charbon de bois varie selon le volume :

                                   Petit volume : usage domestique

                                   moyen volume : usage pour les forges.

                                   Rendement moyen : 17-18 %

                                   Exemple : l stère de    chêne donne 82 kg de charbon

                                                                       hêtre 76

                                                                       mélangés (bois durs) 73

                                                                       sapin et épicéa 53

 

Charbonnier1

 

2.2.) Procédés par fours :

 

Le procédé des meules ayant l'inconvénient de donner un rendement très variable suivant les circonstances extérieures et en moyenne assez faible, certains constructeurs ont cherchés à établir des appareils permettant d'opérer la carbonisation en forêt dans de meilleures conditions.

Le foyer n'est pas au contact du bois.

Il faut chauler à 350 °c pour obtenir la carbonisation.

 

2 2.1.) Appareil Moreau :

 

Il se compose d'un vase en tôle ayant la forme d'un prisme droit octogonal ; sa hauteur est de 2,5 m et chacun des huits côtés a 1 m de largeur. Des cheminées et des buses disposées sur le pourtour et au sommet de ce récipient servent au dégagement des gaz et des liquides produits par la carbonisation. Des prises d'air, ouvertes dans le bas, permettent d'allumer facilement le bois qu'on dispose dans l'intérieur. Au moyen d'une disposition fort ingénieuse, toutes ces ouvertures se ferment d'elles-mêmes, automatiquement quand la. combustion devient trop active.

Rendement : 23-24 %

10 stères se carbonisant en 30 H.

Il y a un récipient de ce type (non octogonal) vers Vernot.

 

Charbonnier2

 

2.2.2.) Appareil Dromart :

 

C’est une cage en forme de dôme, composée de plaques de forte tôles montées sur un bâtis en fonte. La partie supérieure se termine par une cheminée munie d'un couvercle mobile ; la partie inférieure est ouverte et la cage se pose simplement sur une aire préparée comme pour une meule ordinaire.

Dans cette aire, on établit d'ailleurs préalablement, en maçonnerie de briques et d'argiles, un foyer qui, sans j communiquer avec l'intérieur de la cage, y fait pénétrer la chaleur par une série de conduits convenablement disposés à la surface du sol t et dont quelques uns sont recouverts de plaques de fonte.

La cage s'emplit de bois au moyen d'une porte ménagée sur le côté ; on allume le foyer et la carbonisation ne tarde pas à se produire. Lorsque les vapeurs de couleur rouge commencent à se dégager, on éteint le feu, on ferme la cheminée et on laisse refroidir le tout.

Rendement : 25 %

On en trouve plusieurs dans notre région.

 

Charbonnier3

 

III] La vie d'un charbonnier :

 

31) Le travail :

 

3.1.1.) Coupage :

 

Tout charbonnier est en même temps bûcheron. Pendant l'hiver, il faut couper le bois qui doit être carbonisé en été.

Le taillis produisait plus de bois de charbon que la futaie et on le coupait tous les 30 ans.

Les forêts exploitées pour le charbon devinrent donc des taillis, au mieux des taillis sous futaie.

 

3.1.2.) Avant le feu :

 

a) Places à fourneau :

 

Il faut faire la place, c'est à dire niveler, arracher les arbustes et autres (sauf si la place est installée dans un champ).

Si la terre est blanche et argileuse, grasse et compacte, on fera plus de charbon qu'avec une terre noire sèche, légère et friable.

La terre d'un bois est meilleure que la terre d'un champ.

Le charbonnier n'a pas toujours le choix de l'emplacement de ces fauldes.

La place doit être ronde, 20-30 pieds de diamètre et doit être de niveau.

Plus c'est pentu plus il faut abaisser le dessus et à élever le bas.Dans certains coins (quand c’est pentu) les charbonniers ont construits des murets pour élever le bas.

Durée : plusieurs journées parfois.

 

 

IMGP0618

 

 

 

 

 

 

 

 


 

 

On devine la place circulaire entre le citron et le chemin.

 

 

 

b) Construction des fourneaux :

 

C'est le montage de la meule. Il faut chercher le bois qui n'est pas forcément à côté de la faulde.

Durée : 2 par semaine voir 3 par quinzaine.

 

c) Terrassement :

 

Sur la meule mettre un manteau de feuille, de mousses

Couvrir le fourneau de terre et de fraisil ; c'est le terrassement.

Verger : c'est à dire aplanir et serrer la terre avec une échelle.

 

313) pendant le feu :

 

a) Feu allumé :

 

Introduction du feu par la cheminée.

 

b) Feu dirigé :

 

La carbonisation se fait de haut en bas

La carbonisation se passe bien sauf :

- s'il y a du vent (il faut mettre un paravent)

- si la nuit est trop longue et sol humide (printemps)

- si la terre est trop sèche (difficile à terrasser)

- s'il fait trop chaud et trop sec ( le feu des fourneaux avancent faiblement et la carbonisation est faible)

- si c'est trop mouillé, le feu va trop vite et le bois est mal carbonisé

 

La meilleure saison est 1' automne

Il faut souvent serrer la tête, c'est à dire piétiner le sommet de la meule avec les pieds ; c’est le piétinement.

2 fois par jour il faut ouvrir la tête. Pour cela, le charbonnier transperce la tête avec une perche.

Un fourneau se visite matin. soir et 4 fois dans la journée et 2 fois dans la nuit .

Vers la fin de la cuisson, la meule a diminué en taille et la meule se dénomme piéton.

 

314) A lA fin du feu :

 

a) Feu éteint-Refroidissement :

 

Déchausse du pied :

Le charbonnier enlève le bois non carbonisé.

Retaper :

Il tape sur le tas avec un outil pour éteindre.

Il enlève la terre qui recouvre la pièce avec un râclot.

 

b) Tirer le charbon :

 

On tire la nuit car le jour il fait trop chaud et on voit mal le charbon.

Le charbonnier crève, pourfend la pièce de charbon avec de grand crochets.

Il ratisse le charbon de bois

Il trie pour enlever les mouchots (bois qui n'a pas été carbonisé à l'intérieur de la meule).

Surveillance :

Le feu peut reprendre, alors il faut l'éteindre avec de l'eau.

Tamisage du fasy pour récupérer au maximum du charbon

Recouvrement de la partie restante de la pièce entamée.

Ceci afin de protéger le charbon de bois avant la prochaine expédition.

La pièce entamée prend le nom de demeurant.

 

c) Charger le charbon :

 

Mettre le charbon sur la charette.

 

315) Voiturer le charbon :

 

Le printemps avant de la carbonisation, par les soins de l'administration des forges, un avis public est publié dans les communes des forêts exploitées afin que les couturiers, amateurs se rencontrent à l'usine, pour marchander, aux enchères publiques, le voiturage du charbon de telle ou telle exploitation.

 

32) La vie :

 

32 1) Habitat :

 

L'habitat est la baraque faite en perches de bois, de mousses (i1 y en a une reconstituée à la rente des Combes).

En hiver, toute la famille habite dans cette baraque.

En été, la femme et les enfants habitent dans cette baraque et le charbonnier loge dans un bacu qui est une hutte.

 

322) Nourriture :

 

Le pain est établis sur un an et c'est la famille qui le fabrique.

Viande : porc, chèvre (sur l'autorisation de son chef)

Légumes : quand il avait la possibilité, il faisait de la culture sur les anciennes places de fourneaux (choux, raves, carotte,...).

Les vieilles places sont très fertiles sans engrais. Le chanvre, les lentilles, pois, froment y poussent à merveille.

 

 

323 ) Vêtement :

 

En été, vêtement léger noir (des pieds à la tête) à cause des fumées.

En hiver : habillés comme les pauvres gens.

 

IV] Quelques chiffres :

 

Pour faire 100 kg de fer en partant de la fonte , il fallait 350 kg de charbon de bois (1 stère et demie de bois durs)

1 feu = 150 tonnes de fer

1 feu = 10-15 ha de forêt en supposant 200 stères par ha et par coupe.

 

V] Utilité du charbon de bois :

 

Le charbon de bois a été longtemps utilisé pour la fusion des minerais jusqu’à l'évènement de la houille. Il sert maintenant aux usages domestiques et culinaires, pour le travail des doreurs et argenteurs, pour les filtres à épurer l'eau.

 

 

 

Source : Charbonnier dans les bois de l'abbé Eugène Bouchey (1969) PI1-140

         Etude sur la carbonisation du bois par Roux (1870)

         Procédé de carbonisation par M.Larzillière (1878)

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P
<br /> <br /> Bonjour<br /> <br /> <br /> Article très interessant qui nous donne envie de découvrir ces métiers d'autrefois.Vivement les prochains.<br /> <br /> <br /> je n'ai pas trouvé la signification du citron ! cela doit être un terme technique spécifique aux charbonniers ? pouvez vous indiquer le lieu exacte ou a été prise la photo ?  <br /> <br /> <br /> Cordialement <br /> <br /> <br /> <br />
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